
RESPONSABILITES
OBLIGATION DE SECURITE DE RESULTAT DE L'ENTREPRISE DE MAINTENANCE
Celui qui est chargé de la maintenance d'une porte automatique d'accès à un parking est tenu d'une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité de l'appareil.
Cass. Civ. III, 5 Novembre 2020, 19-10857 - A rapprocher : Cass. III, 01 avril 2009, 08-10070, Publié au bulletin
Dont acte...
Le propriétaire d’un élément d’équipement, est censé exercer les pouvoirs de contrôle et de direction qui caractérisent la garde, sur les éléments d’équipement de son immeuble, tels qu'une barrière de parking ou un ascenseur, et en reste responsable au premier chef à l'égard des tiers, sur le fondement de l'article 1242 du Code Civil, sans pouvoir s'exonérer du fait de l'entreprise de maintenance, faute de rapporter la preuve du caractère imprévisible et irrésistible du dommage (Cass. Civ. II, 13 Novembre 2008, 07-19091).
Toutefois, il dispose d'un recours à l'encontre de cette dernière sur le fondement de l'article 1231-1 du Code Civil, pour violation de son obligation de résultat...
Mais cette entreprise ne pourrait-elle pas invoquer à son tour la faute de son client propriétaire de l'ouvrage qui ne lui aurait pas signalé un dysfonctionnement, des avaries, ou un vandalisme dont il avait connaissance entre deux visites de maintenance ? Le client ne commettrait-il pas une faute en faisant l'économie des systèmes de sécurité ou des visites plus fréquentes préconisés par le mainteneur ?
Le vandalisme récurrent qui s'exerce dans certains immeubles - où les ascenseurs sont systématiquement saccagés aussitôt après leur remise en état - n'est certes pas imprévisible, mais est-ce à l'entreprise de maintenance, ou à son assureur, d'en assumer le risque au nom de son obligation de résultat ?
RESPONSABILITE DU FAIT DES CHOSES SOUS LA GARDE DE L'EXPLOITANT D'UN MAGASIN
Dans un arrêt du 20 septembre 2017, (non publié au Bulletin), la première chambre de la Cour de Cassation avait énoncé de manière lapidaire, au visa de l'article L. 221-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 qu’une entreprise de distribution était débitrice à l'égard de la clientèle d'une obligation générale de sécurité de résultat.
Ce principe était ainsi applicable même en cas d'accident subi par un simple badaud se promenant dans l’enceinte d’un magasin sans la moindre intention de conclure un contrat de vente. Il créait un nouveau régime de responsabilité "autonome" de nature contractuelle... même sans contrat...
Par arrêt du 9 Septembre 2020, publié au Bulletin, la même première chambre de la Cour de Cassation est revenue sur sa jurisprudence et a condamné expressément un tel fondement en énonçant :
- La responsabilité de l'exploitant d'un magasin dont l'entrée est libre ne peut être engagée, à l'égard de la victime d'une chute survenue dans ce magasin et dont une chose inerte serait à l'origine, que sur le fondement de l’article 1242, al.1, du Code Civil relatif à la responsabilité extra-contractuelle du fait des choses, à charge pour la victime de démontrer que cette chose, placée dans une position anormale ou en mauvais état, a été l'instrument du dommage.
- Si l’article L. 421-3 du code de la consommation édicte au profit des consommateurs une obligation générale de sécurité des produits et services, il ne soumet pas l'exploitant d'un tel magasin à une obligation de sécurité de résultat à l'égard de la clientèle, contrairement à ce qui a été jugé (Cass. Civ., 20 septembre 2017, n° 16-19109).
Dès lors, il appartient à la victime de rapporter la preuve de prouver que la position anormale ou le mauvais état de la chose a été l’instrument de son dommage.
Cass. Civ. I, 1re civ., 9 septembre 2020, n°19-11882 ; Guillaume Trédez : "La clarification de l'application de la responsabilité du fait des choses en cas de chute dans un magasin et la fin de l'obligation de sécurité de résultat" ; Gaz. Pal. 3 nov. 2020, p. 23.
PRODUITS DEFECTUEUX : Arrêt MONSANTO
1.
Selon l’article 21 de la loi n° 98-389 du 19 mai 1998, transposant aux articles 1386-1 à 1386-18, devenus 1245 à 1245-17 du code civil, la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres, instituant un régime de responsabilité sans faute du producteur du fait d’un produit défectueux, ses dispositions s’appliquent aux produits dont la mise en circulation est postérieure à la date d’entrée en vigueur de la loi, laquelle est intervenue le 22 mai 1998.
Aux termes de l’article 1386-5, devenu 1245-4, du code civil, un produit est mis en circulation lorsque le producteur s’en est dessaisi volontairement et ne fait l’objet que d’une seule mise en circulation.
Il résulte de ce texte que la date de mise en circulation du produit s’entend, dans le cas de produits fabriqués en série, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie (1re Civ., 20 septembre 2017, pourvoi n° 16-19.643, Bull. 2017, I, n° 193)
Selon l’article 1386-6, alinéa 2, 1°, devenu 1245-5, alinéa 2, 1°, du code civil, transposant l’article 3 de la directive précitée, est assimilée à un producteur toute personne agissant à titre professionnel qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif.
En l'espèce, après avoir constaté que, sur le conditionnement du produit, figurent la mention « fabriqué en Belgique », ainsi qu’en petits caractères, les mentions « Monsanto Europe Sa » et « marque déposée de Monsanto company USA », l’arrêt relève que l’étiquette met en avant le fait que le Lasso, écrit en gros caractères blancs sur noir, est un désherbant sélectif du maïs grain, semence et fourrage, du soja, avec la mention « un herbicide Monsanto », suivi de « siège social Monsanto agriculture France SAS » avec l’adresse de la société à Lyon et le numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés de Lyon.
Ayant ainsi fait ressortir que la société Monsanto agriculture France se présentait comme le producteur sur l’étiquette du produit, la cour d’appel a pu en déduire qu’elle devait être assimilée au producteur.
2.
Aux termes de l’article 1386-9, devenu 1245-8 du code civil, transposant l’article 4 de la directive précitée, le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.
Il en résulte que le demandeur doit préalablement établir que le dommage est imputable au produit. Cette preuve peut être apportée par tout moyen et notamment par des indices graves, précis et concordants.
En l'espèce, l’arrêt retient que la victime a acquis du "Lasso" le 13 avril 2004, qu’il verse au débat trois attestations, dont il résulte que son épouse a, le 27 avril 2004, informé un témoin, ayant constaté qu’il titubait, qu’elle conduisait à l’hôpital son mari qui avait respiré du désherbant à maïs et était intoxiqué et lui a demandé d’apporter l’étiquette du produit à l’hôpital, qu’un médecin du travail, référent départemental du réseau Phyt’attitude, a attesté avoir reçu un appel du service des urgences le même jour, pour une demande de renseignement sur la toxicité du Lasso pour un patient hospitalisé et qu’il ressort du compte rendu de consultation que M. X... a été hospitalisé pour avoir inhalé des produits toxiques, en l’occurrence un produit chloré associé à des solvants. Il ajoute que, selon les experts désignés par le tribunal, l’inhalation litigieuse a entraîné une perte de connaissance, des maux de tête et des céphalées violentes, des crachats hémoptoïques et une toux irritative, tous signes cliniques révélateurs d’une atteinte neuronale et du tractus respiratoire au moment de l’intoxication du 27 avril 2004, ainsi qu’un stress post-traumatique.
Ayant estimé, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation et sans présumer l’existence d’un lien causal, que ces éléments de preuve constituaient des indices graves, précis et concordants, la cour d’appel a pu en déduire qu’un tel lien était établi entre l’inhalation du produit et le dommage survenu.
3.
Selon l’article 1386-4, devenu 1245-3 du code civil, transposant l’article 6 de la directive précitée, un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et, dans l’appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.
En l'espèce, l’arrêt relève que l’article 7 de la loi du 2 novembre 1943, modifiée par la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999, impose que l’étiquette des produits visés mentionne les précautions à prendre par les utilisateurs, et que l’article 34 de l’arrêté du 6 septembre 1994, portant application du décret n° 94-359 du 5 mai 1994, dispose que tout emballage doit porter l’indication de la nature des risques particuliers et des protections à prendre pour l’homme, les animaux ou l’environnement sous forme de phrases types choisies de manière appropriée. Il ajoute que la fiche toxicologique établie par l’INRS en 1997 mentionne des recommandations relatives à la manipulation du chlorobenzène en préconisant notamment d’éviter l’inhalation de vapeurs, de prévoir des appareils de protection respiratoire pour certains travaux, et de ne jamais procéder à des travaux sur ou dans des cuves ou réservoirs ayant contenu du chlorobenzène sans prendre les précautions d’usage. Il retient, enfin, que l’étiquetage du produit Lasso ne répond pas à la réglementation dans la mesure où les risques liés à l’inhalation du chlorobenzène, présent en quantité importante dans le Lasso, ne sont pas signalés, pas davantage que la préconisation d’appareils de protection respiratoire pour le nettoyage des cuves.
En raison d’un étiquetage ne respectant pas la réglementation applicable et d’une absence de mise en garde sur la dangerosité particulière des travaux sur ou dans les cuves et réservoirs, on peut estimer que le produit ne présentait pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s’attendre et était dès lors défectueux.
4.
Selon l’article 1386-9, devenu 1245-8 du code civil, transposant l’article 4 de la directive précitée, le demandeur doit prouver le lien de causalité entre le défaut du produit et le dommage.
Cette preuve peut être apportée par tout moyen et notamment par des présomptions ou indices graves, précis et concordants.
Un lien causal ne peut cependant être déduit de la seule implication du produit dans la réalisation du dommage (1re Civ., 27 juin 2018, pourvoi n° 17-17.469, publié, et 29 mai 2013, pourvoi n° 12-20.903, Bull. 2013, I, n° 116).
En l'espèce, après avoir retenu, d’une part, que les troubles présentés par M. X... et constatés par le certificat médical initial et le stress post traumatique ressenti sur le long terme étaient imputables à l’inhalation du Lasso, d’autre part, que ce produit était défectueux pour les raisons précitées, l’arrêt relève que cette inhalation est survenue accidentellement, lorsque, à l’issue d’une campagne d’épandage, l’intéressé a nettoyé la cuve de traitement, que la notice d’information du produit ne faisait apparaître ni la nécessité d’éviter l’inhalation de vapeurs et de réaliser en appareil clos toute opération industrielle, ni celle de porter, dans ce cas, un appareil de protection respiratoire et de ne jamais procéder à des travaux sur ou dans des cuves et réservoirs contenant ou ayant contenu du chlorobenzène sans prendre les précautions d’usage, cette préconisation renvoyant à la recommandation de la fiche toxicologique relative au chlorobenzène.
De ces constatations et énonciations, ne procédant d’aucune dénaturation du rapport d’expertise et desquelles il résulte qu’elle ne s’est pas seulement fondée sur l’implication du produit dans la survenue des troubles ressentis par M. X..., la cour d’appel a pu déduire l’existence d’un lien causal entre le défaut et le dommage subi par celui-ci.
Aux termes de l’article 1386-11, 4°, devenu 1245-10, 4°, du code civil, transposant l’article 7 de la directive précitée, le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut.
La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que « pour pouvoir se libérer de sa responsabilité (...), le producteur d’un produit défectueux doit établir que l’état objectif des connaissances techniques et scientifiques, en ce compris son niveau le plus avancé, au moment de la mise en circulation du produit en cause, ne permettait pas de déceler le défaut de celui-ci » (CJUE 29 mai 1997 Commission / Royaume-Uni, C-300/95).
En l'espèce, après avoir, au vu des éléments de fait et de preuve soumis au débat, fixé en juillet 2002 la date de mise en circulation du produit, en statuant sur l’application au litige des dispositions du code civil relatives au régime de responsabilité du fait des produits défectueux, l’arrêt relève que les réglementations sur le fondement desquelles l’existence d’un défaut a été retenue ainsi que la fiche toxicologique établie par l’INRS en 1997 précitée établissent qu’en juillet 2002, la société Monsanto agriculture France avait toute latitude pour connaître le défaut lié à l’étiquetage du produit et à l’absence de mise en garde sur la dangerosité particulière des travaux.
De ces énonciations et constatations, la cour d’appel a déduit, à bon droit, sans avoir à procéder à un nouvel examen de la date de mise en circulation du produit, que le producteur ne pouvait bénéficier de cette exonération de responsabilité.
5.
Aux termes de l’article 1386-13, devenu 1245-12 du code civil, transposant l’article 8.2 de la directive précitée, la responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d’une personne dont la victime est responsable.
En l'espèce, l’arrêt retient que la victime a inhalé des vapeurs de Lasso, après avoir introduit son visage dans la cuve, que si, comme l’invoquait la société Monsanto, il ne portait pas de protection destinée à éviter un contact du produit sur le visage, en tout état de cause, une telle protection aurait été inefficace en cas d’inhalation, en l’absence d’appareil de protection respiratoire.
La cour d’appel a pu ainsi en déduire que la faute de la victime, alléguée par la société Monsanto, était sans lien de causalité avec le dommage.
Cass. Civ. I, 21 octobre 2020, 19-18689 ; L.Friant : "Clap de fin pour Monsanto", RLDC Mars 2021, p. 21
Rappels :
la simple imputabilité du dommage au produit incriminé ne suffit pas à établir son défaut ni le lien de causalité entre ce défaut et le dommage.
Cass. Civ. I, 27 juin 2018, 17-17469, Publié au bulletin
Si la responsabilité du fait des produits défectueux requiert que le demandeur prouve le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut du vaccin et le dommage, la participation du produit à la survenance du dommage est un préalable implicite, nécessaire à l'exclusion éventuelle d'autres causes possibles de la maladie (sclérose en plaques), pour la recherche de la défectuosité du produit et du rôle causal de cette défectuosité, sans pour autant que sa simple implication dans la réalisation du dommage suffise à établir son défaut au sens de l'article 1386-4 du code civil ni le lien de causalité entre ce défaut et le dommage.
CUMUL DE L'ACTION EN NON CONFORMITE ET POUR VICE CACHE
Aux termes l'article L. 211-1, devenu L. 217-4 du code de la consommation, le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.
Il résulte de l'article L. 211-13, devenu L. 217-13 du même code que l'action fondée sur la garantie légale de conformité ne prive pas l'acheteur du droit d'exercer l'action résultant des vices rédhibitoires telle qu'elle résulte des articles 1641 à 1649 du code civil ou toute autre action de nature contractuelle ou extracontractuelle qui lui est reconnue par la loi.
Le choix d'invoquer la garantie des vices cachés ne prive pas l'acquéreur de la possibilité d'invoquer la garantie de conformité prévue par le code de la consommation.
Cass. Civ. I, 1er Juillet 2020, D 19-11119
L'ACTION EN GARANTIE POUR VICE CACHE N'EST PAS EXCLUSIVE DE L'ACTION EN RESPONSABILITE DELICTUELLE
En l'espèce, par acte du 15 février 2006, Mme Y..., a vendu un immeuble à Mme X....
Se plaignant de désordres découverts lors de travaux de rénovation, l'acheteur a assigné le vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés.
La péremption de l’instance a été constatée.
L'acheteur a alors assigné le vendeur en réparation du préjudice résultant du coût de travaux et du préjudice de jouissance, sur le fondement de l’article 1382 du code civil pour réticence dolosive.
L’action en garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue n’est pas exclusive de l’action en responsabilité délictuelle fondée sur le dol ou la réticence dolosive commis avant ou lors de la conclusion du contrat.
Cass. Civ. III, 23 septembre 2020, 19-18104
Rappel : Les défauts affectant la chose vendue et rendant celle-ci impropre à l'usage auquel elle était destinée, ne peuvent ouvrir à l'acheteur que la seule action en garantie légale des vices des articles 1641 et suivants du Code Civil, ce qui exclut celle reposant sur un manquement à l'obligation de délivrance (1603 C.Civil) et de conformité (L 217-4 C.Conso) de la chose avec ce qui était convenu avec l'acheteur : Cass. Civ I, 19 février 2014, 12-22878 - Cass. 3e civ., 4 octobre 1995, n° 93-14879
VICE CACHE ET DOMMAGE REPARABLE
Une maison d'habitation a été vendue moyennant le prix de 98 000 €.
A la suite de l'apparition de désordres et après expertise, les acquéreurs ont assigné notamment le vendeur en garantie des vices cachés, sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code Civil.
Il résulte de l'article 1645 du code civil que le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu de tous les dommages-intérêts envers l'acheteur, qui peut exercer l'action en indemnisation indépendamment de l'action rédhibitoire ou estimatoire (Cass. Com., 19 juin 2012, 11-13176, Bull. 2012, IV, n° 132 ; Cass. Civ. I, 26 septembre 2012, 11-22399, Bull. 2012, I, n° 192 ; Cass. Civ. III, 24 juin 2015, 14-15205, Bull. 2015, III, n° 66).
Ainsi, lorsque l'immeuble vendu est atteint de vices cachés nécessitant sa démolition, l'acquéreur qui a choisi de le conserver sans restitution de tout ou partie du prix de vente est fondé à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages-intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction.
Le vendeur de mauvaise foi peut être condamné à des dommages-intérêts correspondant à l'intégralité du préjudice subi et l'acquéreur est en droit de demander la réparation de tout préjudice imputable au vice.
En l'espèce, il était établi que la nouvelle habitation aurait la même superficie que l'ancienne et que le préjudice subi par les acquéreurs ne pouvait être réparé, sans enrichissement sans cause, que par la démolition et la reconstruction du bâtiment, seules de nature à mettre fin aux vices constatés, y compris d'implantation.
Dès lors, la demande en indemnisation des acquéreurs, fondée sur les règles de la responsabilité civile, incluant le coût des travaux de démolition et de reconstruction d'un montant de 129.931 €, soit bien supérieure au prix de vente, doit être accueillie.
Cass. Civ. III, 30 janvier 2020, 19-10176, Publié au bulletin
Selon l'article 1644 du Code Civil, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
L'action estimatoire n'ayant pas un caractère indemnitaire, cette restitution du prix ne constitue pas la réparation d’un préjudice indemnisable, mais a pour seul objet de rétablir l'équilibre contractuel en compensant, par la restitution d'une partie du prix de vente, la perte d'utilité du bien résultant de l'existence d'un vice caché.
Dès lors, le cumul des sommes allouées au titre de l’action estimatoire et des dommages et intérêts ne peut excéder la perte de l’utilité de la chose.
Ainsi, la restitution d'une partie du prix de vente et l'indemnité allouée pour la démolition et la reconstruction compensent l'une et l'autre la "perte de l'utilité de la chose". (Cass. Civ. III, 14 décembre 2017, 16-24170, Publié au bulletin )
Dans l'action rédhibitoire, le vendeur professionnel, censé connaître les vices de la chose, est tenu, outre à la restitution du prix, à des dommages-intérêts en réparation de l'intégralité du préjudice causé. (Cass. Civ. I, 6 juillet 1999, 97-16885)
Mais l'action en réparation du préjudice subi du fait d'un vice caché n'est pas subordonnée à l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire et peut, par suite, être engagée de manière autonome.
L’action indemnitaire engagée à titre principal, et indépendamment des autres, permet d'obtenir la réparation de l'intégralité du préjudice, même si son montant excède le prix de la vente.
L'indemnité accordée peut être supérieure à la valeur de la chose ou encore au montant du prix que le vendeur aurait été tenu de restituer dans le cadre de l'action rédhibitoire, et dans l'évaluation de l'indemnité, il ne peut être fait application d'un abattement pour vétusté sur le coût de la démolition et de la reconstruction d'une maison. (Cass. Civ. III, 8 octobre 1997, 95-19808, Publié au bulletin )
CIRCULATION : IMPLICATION DU VEHICULE DEPASSE MEME SANS MANOEUVRE PERTURBATRICE
Il résulte de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 qu'un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation.
Il en est ainsi en ce qui concerne un premier véhicule qui s'est serré sur la droite pour laisser un autre véhicule le dépasser, et n'a effectué aucune manoeuvre perturbatrice ayant contribué à la réalisation de la collision survenue entre ce deuxième véhicule et un troisième véhicule circulant en sens inverse.
En effet, une manoeuvre perturbatrice n'est pas une condition de l'implication.
Cass. Civ. II, 24 Septembre 2020, 19-18036
NOTION DE PERTE DE CHANCE
Il résulte de l'actuel article 1231-1 du Code Civil que seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, et que le préjudice causé par une telle perte est distinct de l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Toutefois, la réparation doit être intégrale lorsque la faute a causé le préjudice en son entier, et non une simple perte de chance.
Cass. Civ. I, 11 mars 2020, 18-26577
Par ailleurs, toute perte de chance ouvre droit à réparation.
Dès lors que la responsabilité d'une banque est engagée pour n'avoir pas appelé l'attention de son client sur les limites de la garantie d'assurance souscrite par celui-ci, il existe une perte de chance d'avoir souscrit une assurance lui garantissant le risque d'une incapacité totale de travail, le client, en l'espèce, n'ayant pas à démontrer que, complètement informé, il aurait contracté une garantie plus large moyennant une cotisation plus élevée.
Cass. Civ. II, 20 mai 2020, 18-25440 publié au Bulletin ; bjda.fr 2020, note A. Astegiano-La Rizza ; note Laura Vitale : "De l'invocation rigoureuse du préjudice de perte de chances en matière assurantielle", Gaz. Pal. 28 juill. 2020, p. 20.
ASSURANCES

EXCLUSION DE RISQUE :
UNE CLAUSE D'EXCLUSION DE RISQUE DOIT SE REFERER A DES CRITERES PRECIS
La clause d'exclusion de garantie concernant « les sinistres résultant et/ou provenant de la pratique des activités amateurs » telles que les « sports impliquant l'usage d'un engin à moteur » doit être considérée comme insuffisamment limitée au sens de L 113-1 du Code des Assurances, comme ne se référant pas à des critères précis.
Cass. Civ. II, 8 Octobre 2020, 19-21105
LA CLAUSE D'EXCLUSION DE RISQUE NE DOIT PAS AVOIR A ETRE INTERPRETEE
Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances qu'une clause d'exclusion de garantie ne peut être formelle et limitée dès lors qu'elle doit être interprétée.
La clause d'exclusion s'appliquant à une conduite concomitante avec une prise régulière quotidienne de produits stupéfiants a un caractère ambigü nécessitant une interprétation qui la prive de son caractère formel et limité.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 16 juillet 2020, 19-15.676 ; Anne Pélissier : "Interpréter ou appliquer une clause d'exclusion… la distinction est parfois ténue", RGDA septembre 2020, p. 20
LA CLAUSE D'EXCLUSION DE RISQUE DES AFFECTIONS NEUROLOGIQUES EST FORMELLE ET LIMITEE
L'exclusion de la garantie des affections neurologiques (étant précisé que la sclérose en plaques n'est pas considérée comme une affection neurologique), des dépressions nerveuses ou autres troubles psychiques ainsi que de toute manifestation justifiant un traitement relatif à la neuropsychiatrie, sauf si elles ont nécessité une hospitalisation (hormis hospitalisation de jour) en milieu psychiatrique de plus de sept jours continus, est formelle et limitée et doit recevoir application, les causes de la dépression étant, selon la clause précitée, sans influence sur l'exclusion de garantie.
Cass. civ., II 24 sept. 2020, 19-19484 ; RGDA nov. 2020, p. 19, note Anne Pélissier
FAUSSE DECLARATION INTENTIONNELLE DE RISQUE
A la question « avez-vous subi une ou plusieurs interventions chirurgicales ? », posée dans les questionnaires de santé qu'elle a signés le 11 avril et le 5 juillet 2007, un assuré a répondu par la négative, alors qu'il avait subi au moins trois interventions au genou, dont la plus ancienne remontait à moins de cinq ans.
C'est en connaissance de cause, et donc intentionnellement, que l'assuré a ainsi répondu par la négative à la question posée, d'autant qu'il avait lui-même communiqué à la banque, lors de la souscription du second prêt, des courriers médicaux faisant état de ces interventions chirurgicales.
Le fait d'avoir remis de telles pièces ne peut valoir exonération ou excuse postérieure d'avoir à répondre sincèrement au questionnaire qui lui était soumis.
Cass. Civ., 16 juillet 2020, 19-16107 ; Jérôme Kullmann : "Fausse déclaration intentionnelle de risque : le mensonge l'emporte sur la vérité qui l'accompagne", RGDA septembre 2020, p. 18.
L'ACTION DIRECTE DE LA VICTIME DOIT ETRE FORMALISEE CONTRE L'ASSUREUR DU RESPONSABLE
Le tiers lésé ne peut réclamer "pour le compte du responsable" l'application de la garantie résultant de la police d'assurance liant ce dernier avec son assureur.
Il lui appartient de formaliser expressément l'action directe qui lui est reconnue par l'article L 124-3 du Code des Assurances par une demande de condamnation contre l'assureur du responsable, le Juge ne pouvant modifier ses prétentions...
Cass. Civ. I, 11 mars 2020, 18-26577
Voilà une décision qui met en évidence la confusion commise par certains Conseils entre l'action directe donc dispose légalement la victime d'un dommage contre l'assureur du responsable , et l'action en garantie donc dispose le responsable à l'égard de cet assureur.
Le tiers lésé n'est fondé à agir que sur la base du droit propre et autonome qui lui est attribué par l'article L 124-3 du Code des Assurances sur l'indemnité due par l'assureur du responsable, et non "pour le compte" de l'assuré responsable...
L'article L. 124-3 du code des assurances accorde au tiers lésé dispose un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Cette action directe ne peut être assortie de conditions que la loi ne prévoit pas, et notamment de la condition que le tiers lésé ait préalablement supporté le montant des dommages dont il demandait l'indemnisation à l'assureur du responsable.
Cass. Civ. II, 20 mai 2020, 18-24093 ; RGDA juill. 2020, p. 14, note Agnès Pimbert ; Ph. Casson : "L’action directe de la victime n’est pas conditionnée au paiement par celle-ci d’une quelconque indemnité", BJDA n°70
LA LIMITATION TERRITORIALE D'UNE GARANTIE D'ASSURANCE N'EST PAS CONTRAIRE AU DROIT DE L'UE
L’article 18, premier alinéa, TFUE prévoit que, dans le domaine d’application des traités, et sans préjudice des dispositions particulières qu’ils prévoient, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité.
Il doit être interprété en ce sens que cette interdiction ne trouve pas à s’appliquer à une clause, prévue dans un contrat conclu entre une compagnie d’assurances et un fabricant de dispositifs médicaux (prothèses PIP), limitant la portée géographique de la couverture d’assurance de responsabilité civile du fait de ces dispositifs aux dommages survenus sur le territoire d’un seul État membre, dès lors qu’une telle situation ne relève pas, en l’état actuel du droit de l’Union, du domaine d’application de celui-ci.
CJUE 11 juin 2020, C-581/18 - TÜV Rheinland LGA Products et Allianz IARD RGDA septembre 2020, p. 52, note Pauline Pailler,
RESISTANCE ABUSIVE DE L'ASSUREUR
L'assureur peut commettre une faute faisant dégénérer en abus le droit de l'assureur de se défendre en justice, notamment lorsqu'à la lecture d'un rapport d'expertise judiciaire, il n'existe plus aucun doute raisonnable l'autorisant à différer encore le respect de ses obligations contractuelles mais maintient sa position alors même qu'il n'était pas en mesure de prouver que son assuré avait commis une faute, et ce depuis cinq années...
Lorsqu'après de longs mois d'expertise, l'expert a conclu à une absence de preuve quant à l'origine volontaire de l'incendie, le refus persistant de l'assureur de verser, au moins à titre provisionnel, les indemnités dues à son assuré et sa volonté réitérée de poursuivre une instance qui, au moins sur le principe de la garantie due à son assuré, était manifestement vouée à l'échec, doivent être considérés comme fautifs.
Cass. Civ. II, 25 juin 2020, 19-12023 ; RGDA octobre 2020, p. 16, note Romain Schulz -
ASSURANCE DE PROTECTION JURIDIQUE : PRINCIPE DU LIBRE CHOIX DE L'AVOCAT POUR UNE PROCEDURE DE MEDIATION JUDICIAIRE OU EXTRAJUDICIAIRE
La Directive Solvabilité II édite le principe du libre choix de l'avocat en matière d'assurance de protection juridique, pour défendre, représenter ou servir les intérêts de l'assuré dans une procédure judiciaire ou administrative, ou chaque fois que surgit un conflit d'intérêts entre cet assuré et son assureur.
L’article 201, paragraphe 1, sous a), de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et duConseil, du 25 novembre 2009, sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II), doit être interprété en ce sens que la notion de "procédure judiciaire" visée à cette disposition inclut une procédure de médiation judiciaire ou extrajudiciaire dans laquelle une juridiction est impliquée ou susceptible de l’être, que ce soit lors de l’engagement de cette procédure ou après la clôture de celle-ci
CJUE, 14 mai 2020, C-667-18 - Ce principe est consacré dans l'article L 127-3 du Code des Assurances.
PROCEDURE
DECLARATION D'APPEL : CHEFS DE JUGEMENT CRITIQUES ET EFFET DEVOLUTIF
L'article 901 et 933 du Code Civil imposent à l'appelant d'indiquer à peine de nullité dans sa déclaration d'appel les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
En vertu de l'article 562 du code de procédure civile ..., l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d'appel n'aurait pas été sollicitée par l'intimé.
Par ailleurs, la déclaration d'appel affectée d'une irrégularité, en ce qu'elle ne mentionne pas les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.
...Dès lors, une cour d'appel, constatant que la déclaration d'appel se bornait à solliciter la réformation et/ou l'annulation de la décision sur les chefs qu'elle énumérait et que l'énumération ne comportait que l'énoncé des demandes formulées devant le premier juge, peut en déduire à bon droit, sans dénaturer la déclaration d'appel et sans méconnaître les dispositions de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'elle n'est saisie d'aucun chef du dispositif du jugement.
Cass. Civ. II, 2 juillet 2020, 19-16954, Gaz. Pal. 6 octobre 2020, n° 388c4, p. 24, note Stéphane Fertier
MISE EN CONFORMITE DES ECRITURES D'APPEL AVEC LES ARTICLES 542 ET 954 DU CPC
Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses Conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.
Ainsi, en matière de saisie conservatoire, dans la mesure ou un appelant ne demanderait pas l’infirmation du jugement attaqué mais l’annulation des saisies, leur mainlevée ou leur cantonnement, le jugement ne pourrait être que confirmé.
En effet, la cour d’appel ne peut statuer sur les aspects du litige tranchés par le jugement qu’en raison de son infirmation ou son annulation préalable.
(Cependant, en l'espèce, la Cour de Cassation a estimé que "l’application immédiate de cette règle de procédure, qui résulte de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’a jamais été affirmée par la Cour de cassation dans un arrêt publié, dans les instances introduites par une déclaration d’ appel antérieure à la date du présent arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.
En effet, une application immédiate de cette règle nouvelle à des litiges antérieurs à sa formulation serait susceptible de porter atteinte au principe de sécurité juridique, et par là-même aux exigences de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.)
Néanmoins, il convient désormais de bien veiller à solliciter l'infirmation ou l'annulation du Jugement dans le dispositif des Conclusions d'appel, préalablement aux autres prétentions, sous peine de confirmation automatique de la décision entreprise...
Les avocats doivent donc immédiatement mettre leurs écritures d'appel en conformité avec cette règle nouvelle, sous peine d'engager leur responsabilité professionnelle.
Cass. Civ. II, 17 septembre 2020, 18-23636
ACTION DIRECTE ET COMPETENCE TERRITORIALE
Il est de jurisprudence constante que la victime exerçant l'action directe peut se prévaloir soit des règles de compétence issues des articles 42 et suivants du code de procédure civile, soit de celles de l'article R. 114-1 du code des assurances, qui donne compétence au tribunal du domicile de l'assuré.
Par ailleurs, les termes de l'article 46 du même code, en matière délictuelle, dispose que le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.
Aucun texte ne permet donc de retenir la compétence territoriale de la juridiction dans le ressort de laquelle demeure la victime, sauf si celle-ci est également celle du lieu du siège social de l'assureur défendeur (Art. 42 CPC), ou celle où le dommage est subi (Art. 46 CPC), où encore celle du domicile de l'assuré (Art. R 114-1 Code Ass.).
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 16 juillet 2020, 19-18.795, Publié au bulletin ; RGDA septembre 2020, p. 64, note Romain Schulz.
FIN DE NON RECEVOIR ET CADUCITE
Les dispositions de l'article 125, alinéa 1, du code de procédure civile selon lesquelles les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public ne sont pas applicables aux formalités prévues à peine de caducité.
La caducité de l'appel n'étant invoquée parles appelants que dans le corps de leur écritures, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de relever d'office cette caducité, en a exactement déduit qu'en application de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, elle n'avait pas à statuer sur cette prétention.
Cass. civile II, 25 juin 2020, 18-26685 19-10157, Publié au bulletin
PRESCRIPTION CIVILE
Selon l'article 2241 du code civil la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
Si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoiqu'ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première.
Il résulte de l'article 2224 du code civil que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 8 juillet 2020, 18-24.441, Publié au bulletin
Rappels :
En matière commerciale, le point de départ du délai de la prescription extinctive prévu à l’article L. 110-4 du code de commerce court à compter de la vente initiale, de sorte que l’action récursoire du vendeur contre le fabricant ne peut ouvrir à l’acquéreur final plus de droits que ceux détenus par le vendeur intermédiaire : Cass. Civ. I, 6 juin 2018, 17-17438, Publié au bulletin.
L’action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, peut aussi être enfermée dans le délai de prescription commmerciale prévu par l’article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente initiale : Cass. Com., 16 janvier 2019, 17-21477, Publié au bulletin.
Le point de départ du délai de prescription de l’article L. 110-4, I, du code de commerce auquel était soumise l’action contractuelle directe d’un Maître d’ouvrage contre un des fournisseurs de son entrepreneur, fondée sur la non-conformité de matériaux, doit être fixé à la date de leur livraison à cet entrepreneur : Cass. Civ. III, 7 juin 2018, 17-10394, Publié au bulletin.
En matière de vente “civile”, l’article 2224 du Code Civil fait normalement courir le délai de prescription de 5 ans à compter du moment où le titulaire de l’action a été en mesure d’agir, c'est à dire en principe à la date de la connaissance du dommage (cette durée ne pouvant être plus longue que 20 ans courant à compter de la naissance du droit- (Art. 2232 du Code Civil).
Toutefois, l’article 1646 du Code Civil soumet également l’acheteur au bref délai de 2 ans à compter de la découverte du vice pour agir en garantie des vices cachés.
Le bref délai de l’action récursoire fondée sur la garantie des vices cachés, exercée par le vendeur intermédiaire ou l’entrepreneur à l’encontre de son fournisseur, ne court pas à compter du jour de la révélation du vice à l’acquéreur, mais de la date où l’intermédiaire ou l’entrepreneur est lui-même assigné ou, en l’absence d’assignation, à la date où le paiement d’une somme d’argent lui est réclamé : Cass. Civ. III,2 juin 2016, 15-17.728, Inédit – Cass. Civ. I, 24 septembre 2002, 00-16040.
En matière de responsabilité du fait des produits défectueux, l’article 1245-15 fait courir une prescription de 10 ans à compter de la mise en circulation du produit.
Selon l’article 1245-16, le demandeur dispose alors d’un délai de 3 ans pour agir à compter de la date à laquelle il a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur.
Voir : En matière de construction
Aux termes de l’Article 2254 du Code Civil, la durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d’un an ni étendue à plus de dix ans. Les parties peuvent également, d’un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d’interruption de la prescription prévues par la loi.
Les deux dispositions précédentes ne sont cependant pas applicables aux actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts.
Selon l’article L 218-1 du Code de la Consommation, et par dérogation à l’article 2254 du code civil, en ce qui concerne les contrats passés entre un professionnel et un consommateur qui ne peuvent, même d’un commun accord, ni modifier la durée de la prescription, ni ajouter aux causes de suspension ou d’interruption de celle-ci : Il s’agit d’une règle d’ordre public.
LE NON RESPECT D'UNE CLAUSE COMPROMISSOIRE EST UNE EXCEPTION DE PROCEDURE
Conformément à l'article 74 du code de procédure civile, l'exception tirée de l'existence d'une clause compromissoire est régie par les dispositions qui gouvernent les exceptions de procédure, de sorte qu'elle doit, à peine d'irrecevabilité, être soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, et notamment devant le Juge de la Mise en Etat devant le Tribunal Judiciaire (Art. 789 CPC).
Cass., Civ. I, 13 mai 2020, 18-25966, Publié au bulletin ; LEDC juill. 2020, p. 3, note Gaëtan Guerlin ; Gaz. Pal. 23 juin 2020, p. 35, Catherine Berlaud ; LEDC juillet 2020, p. 3, note Gaëtan Guerlin.