Jean-François CARLOT, Docteur en Droit, Avocat Honoraire
| TENDANCES JURISPRUDENTIELLES publiées au 1er semestre 2017 |
RESPONSABILITES |
Il résulte des articles 67, IV, de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 et 72, II, de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 que les créances des tiers payeurs ne peuvent être mises à la charge de l'ONIAM qu'à la condition que les dommages liés à une contamination transfusionnelle de l'assuré par le virus de l'hépatite C puissent être couverts par l'assurance souscrite par l'établissement de transfusion sanguine ayant fourni les produits sanguins contaminés ;
En l'absence d'ouverture d'une action en garantie de l'ONIAM contre l'assureur de l'établissement de transfusion sanguine, la caisse ne peut exercer aucun recours subrogatoire contre l'Office.
Cass. civ. I, 16 novembre 2016, 15-26932 ; RC et Ass. 2017, Com. 34, note H.Groutel.
L'avocat commet une faute en ne déposant pas, dans le délai requis, une demande d'aide au recouvrement des dommages et intérêts (SARVI) alloués aux victimes d'une infraction pénale par la juridiction répressive.
Selon l'article 706-15-1 du code de procédure pénale, toute personne physique qui, s'étant constituée partie civile, a bénéficié d'une décision définitive lui accordant des dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une infraction pénale, mais qui ne peut pas obtenir une indemnisation en application des articles 706-3 ou 706-14 du même code, peut solliciter une aide au recouvrement de ces dommages-intérêts ainsi que des sommes allouées en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
Selon l'article L. 422-7 du code des assurances, dans le délai de deux mois de la réception de la demande d'aide au recouvrement, le FGTI accorde à la partie civile le paiement intégral des sommes qui lui ont été allouées si leur montant est inférieur à 1 000 euros et une provision correspondant à 30 % du montant de ces sommes si celui-ci est supérieur à 1.000 euros, dans la limite d'un montant de 3.000 euros, sans que le montant de la provision soit inférieur à 1 000 euros.
La somme versée par le FGTI à la partie civile dépend donc exclusivement de la condamnation prononcée par la juridiction pénale statuant sur intérêts civils.
Cass. Civ. II, 17 Novembre 2016, 16-10941 ; RCA 2017, Com. 42
L'avocat manque aux obligations de son mandat en s'abstenant d'informer son client de l'existence de la prescription instituée par l'article L. 114-1 du code des assurances.
La perte de chance subie par celle-ci doit être évaluée à l'aune des moyens qui pouvaient être opposés à une action de l'assurée par l'assureur
La demande de réparation intégrale d'un préjudice, doit être distinguée de la demande d'indemnisation de la perte de chance d'obtenir une indemnité d'assurance.
Cass. Civ. I, 16 novembre 2016, 15-25513 ; RCA 2017, Com. 41 - D.Sindres "La responsabilité des professionnels du droit est-elle subsidiaire ?", Dalloz 2017, Chronique 553.
L'appréciation du préjudice direct et certain résultant de la perte de chance de voir réformer un jugement correctionnel, nécessite la reconstitution fictive de la discussion qui aurait pu s'instaurer en cause d'appel au regard des conclusions et des pièces produites.
Cass. Civ. I, 15 mars 2017, 15-24061 - Voir sur le site de Yves Avril sur la "Responsabilité des avocats"
Le seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vices est impropre à caractériser une faute délictuelle.
Cass. Civ. III, 18 mai 2017, 16-11203 - Dalloz 2017, 1225, note D.Houtcieff ; GP 10 Octobre 2017, p.22, note Z.Jacquemin.
Rappel :
"Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage".
Ass. Plénière, 6 Octobre 2006, 05-13255 ; Dalloz 2006,Jur. p.2826, note G.Biney "La responsabilité du débiteur à l'égard du tiers auquel il a causé un dommage en manquant à son obligation contractuelle" ; P.Brun :"Feu la relativité de la faute contractuelle" , Revue Lamy Droit Civil, Janvier 2007, p.5 - Voir : Chronique J.S. Borghetti "La responsabilité des contractants à l'égard des tiers dans le projet de réforme de la responsabilité civile" ; Dalloz 2017, 1846
Le participant à une activité de saut à l'élastique ne contribue pas à sa sécurité par son comportement, la seule initiative qu'il peut avoir résidant dans la décision de sauter ou non et dans la force de l'impulsion donnée et ne dispose d'aucun moyen de se prémunir lui-même du danger qu'il court en sautant.
Il s'en remet donc totalement à l'organisateur pour assurer sa sécurité, de sorte qu'aucun élément ne permet de considérer qu'il joue un rôle actif au cours du saut.
L'obligation contractuelle de sécurité de l'organisateur d'une telle activité est une obligation de résultat.
Cass. Civ. I, 30 novembre 2016, 15-25249 ; RCA 2017, Com. 38
Une association n'est tenue de prendre des mesures particulières de sécurité que pour prévenir des risques en lien avec l'activité pratiquée.
Une agression causée par un groupe de personnes venant de l'extérieur n'est pas en lien avec l'activité pratiquée.
Cass. Civile I, 30 novembre 2016, 15-20984 ; RC et Ass. 2017, Com.37.
Avant même la mise en oeuvre de l'arrêté du 14 août 2012 et l'entrée en vigueur du décret 2012-639 du 4 mai 2012 , une entreprise intervenant sur un chantier en 2007, où le risque d'inhalation de fibres d'amiantes était identifié et connu, était débitrice d'une obligation générale de sécurité de résultat, non seulement à l'égard de ses salariés mais aussi à l'égard de toute personne se trouvant à proximité du site, et d'une obligation générale d'adaptation à l'évolution des connaissances scientifique.
Le risque de dommage auquel était exposé la victime doit être certain sans qu'il soit nécessaire que ce risque se soit réalisé de manière effective.
La défaillance dans la mise en oeuvre de la protection du public et des salariés contre l'inhalation de poussières d'amiante produites par les travaux entrepris sur le site entraînait un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente lié à l'inhalation de fibres d'amiante, en relation directe et immédiate avec la violation manifestement délibérée des dispositions du code du travail, caractérise le délit de l'article 223-1 du code pénal.
Cass. Crim., 19 avril 2017, 16-80695 ; Dalloz 2017, 869
Au sens de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation.
Un motocycliste n'a donc pas à démontrer que le tracteur qu'il dépasait, et avec lequel il n'y a eu aucun contact, a eu un comportement perturbateur.
Il suffit qu'il apporte la preuve qu'il a joué un rôle dans l'accident.
Cass. Civ. II, 2 mars 2017, 16-15562 ; Publicé au Bulletin ; D.Mazeaud, "Implication : la valse hésitation", Dalloz 2017, 902,
Une voie ferrée n'est pas une voie commune aux chemins de fer et aux usagers de la route, ces derniers pouvant seulement la traverser à hauteur d'un passage à niveau, sans pouvoir l'emprunter.
L'accident survenu entre un train et un véhicule automobile n'est donc pas soumis à la loi Badinter.
Cass. Civ. II, 17 novembre 2016, 15-27832 ; RCA 2017, Com. 33.
L'état de confusion mentale ou, à tout le moins, d'absence momentanée de discernement au moment de l'accident, exclut le caractère inexcusable de la faute commise par un passager qui saute d'un taxi en marche sur l'autoroute.
Cass. Civ. II, 2 mars 2017, 16-11986
Rappel :"Seule est inexcusable, au sens de la loi du 5 juillet 1985, la faute volontaire d'une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience" : Cass. Civ., 20 juill. 1987, 86-11275 + 10 arrêts],RGAT 1987, 584 - Ass. plén., 10 nov. 1995, 94-13912 ; D. 1995, 633, rap. Y.Chartier ; RTDC 1996, 1987, obs. P.Jourdain).
Le projet de réforme de la responsabilité civile envisage la codification de la loi Badinter (Articles 1285 et suivants Code Civil". La victime de dommages corporels conductrice ne pourra plus se voir opposer sa faute pour réduire ou exclure son droit à indemnisation, et ne pourra se voir opposer que sa faute inexcusable, même "lorsqu’elle ne sera pas la cause exclusive de l’accident".
Conformément aux articles 16-3 et 1382 du code civil, le refus d'une personne, victime du préjudice résultant d'un accident dont un conducteur a été reconnu responsable, de se soumettre à des traitements médicaux, qui ne peuvent être pratiqués sans son consentement, ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l'intégralité des préjudices résultant de l'infraction.
Cass. Cri., 27 septembre 2016, 15-83309
Il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
Dans la mesure où le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation est indemnisé dans les conditions prévues à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, de sorte que ce préjudice est couvert, même de manière restrictive, par le livre IV du code de la sécurité sociale, il ne peut donner lieu à indemnisation sur le fondement de l'article L. 452-3 du même code.
le préjudice d'agrément réparable en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs
Le préjudice d'établissement réparable en application de ce texte consiste en la perte d'espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap.
Les difficultés d'assumer son rôle d'époux, de père et de grand-père, pour une victime qui n'était âgée que de 52 ans au moment de l'accident qui a vu sa vie familiale et personnelle bouleversée, l'empêchant de faire tout projet d'avenir, altérant son rôle et sa place au sein de la cellule familiale auprès de son épouse et de sa fillene caractrise pas l'existence d'un préjudice d'établissement distinct du déficit fonctionnel permanent indemnisé par la rente versée par la sécurité sociale à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
Le préjudice permanent exceptionnel réparable correspond à un préjudice extra-patrimonial atypique, directement lié au handicap permanent qui prend une résonance particulière pour certaines victimes en raison soit de leur personne, soit des circonstances et de la nature du fait dommageable, notamment de son caractère collectif pouvant exister lors de catastrophes naturelles ou industrielles ou d'attentats, ne peut pas être constitué par la seule impossibilité pour la victime de poursuivre un engagement religieux, politique ou associatif et qu'en l'espèce et ne peut donc pas être caractérisé par du déficit fonctionnel permanent par ailleurs indemnisé.
Cass. Civ. II, 2 mars 2017, 15-27523, Publié au Bulletin
ASSURANCES |
Le dommage résultant d'un manquement au devoir de conseil dû à l'assuré sur l'adéquation de la garantie souscrite à ses besoins se réalise au moment du refus de garantie opposé par l'assureur, point de départ de la prescription.
Cass. Civ. II, 18 mai 2017, 16-754
Il résulte de l'article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances que le FGAO qui exerce un recours contre le responsable des dommages subis par la victime qu'il a indemnisée est un tiers au sens de ce texte, de sorte que le délai de la prescription biennale de l'action du responsable contre son assureur ne court que de la date de ce recours.
Cass.civ.II, 12 janvier 2017, 15-26.325, Publié au bulletin
L'obligation, prévue par l'article R. 112-1 du code des assurances, de rappeler dans les contrats d'assurances les dispositions légales concernant la prescription des actions dérivant du contrat s'inscrivant dans le devoir général d'information de l'assureur lui impose de porter à la connaissance des assurés une disposition qui est commune à tous les contrats d'assurance, de sorte que cette obligation s'applique aux contrats d'assurance sur la vie.
Cass. Civ. II, 17 novembre 2016, 15-25316 ; RC et Ass. 2017, Com.63, note H.Groutel.
L'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception adressée par l'assureur à l'assuré ne peut interrompre la prescription biennale de l'article L 114-1 du Code des Assurances, qu'en tant qu'elle concerne le paiement de primes (et non le remboursement de franchise...)
Cass. Civ. II, 8 Juin 2017, 16-19161 , Dalloz 2017, 1250.
En raison d'un sinistre survenu trois ans auparavant, un assuré connaissait depuis lors l'état de vétusté des planchers, lesquels nécessitaient une réfection qu'il n'avait pas effectuée, et relevé que le contrat d'assurance qu'il avait souscrit auprès de la société Axa stipulait que les dommages, ayant pour origine un défaut d'entretien ou de réparation incombant à l'assuré, caractérisé et connu de lui, n'entraient pas dans l'objet ni dans la nature du contrat, eu égard aux manquements antérieurs au sinistre de l'assuré, qui caractérisaient l'absence d'aléa, les conditions de mise en oeuvre de garantie de la police n'étaient pas réunies.
D'autre part, après avoir relevé que l'assuré avait appris la présence d'insectes xylophages à l'occasion du second sinistre, la cour d'appel a pu retenir que l'état général de vétusté des planchers, caractérisé par des fissurations et un effondrement partiel lorsque le premier sinistre était survenu, suffisait à rendre nécessaire leur réfection sans attendre de connaître l'existence d'un phénomène partiellement aggravant.
Cass. Com., 11 mai 2017, 15-29065 - A contrario voir :![]()
Les stipulations claires et précises des conditions générales excluant de la garantie pour l'ensemble des dommages « le prix des produits et/ou le coût de leur remplacement, réparation, mise au point, parachèvement », sans distinguer selon que la réparation est provisoire ou définitive ni selon que les frais de réparation ont été exposés par l'assuré ou par le client, exclut de la garantie le coût des pièces détachées issues de son stock ayant servi à la réparation du matériel vendu par l'assuré.
Cass. Civ. II, 2 mars 2017, 16-12120 ; M.Asselain : "Assureurs, soyez précis, mais pas trop ! à propos de l'exclusion des dommages subis par le produit", RGDA 2017, 280.![]()
Si l'article L. 113-9 du code des assurances institue au profit de l'assureur qui découvre avant sinistre l'aggravation non déclarée du risque, une option entre la résiliation et la proposition à l'assuré d'une prime majorée, il n'organise pas la sanction de la réticence lorsque le sinistre survient avant la rupture du contrat ou l'intervention d'un nouvel accord, alors que l'assureur demeure engagé par le contrat primitif malgré l'aggravation.
Cette éventualité doit être assimilée au cas de constatation après sinistre, dès lors que dans ces deux hypothèses, ni la résiliation, ni un nouvel accord ne peuvent intervenir avant la survenance du sinistre.
Ayant constaté que les risques n'avaient pas été complètement et exactement déclarés par l'assuré par suite de son manquement aux prescriptions du contrat qui lui faisaient l'obligation de faire vérifier chaque année les installations électriques et de communiquer les rapports annuels à l'assureur... et que la résiliation du contrat n'était intervenue que postérieurement au second sinistre, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que la règle proportionnelle de primes avait vocation à s'appliquer à chacun des sinistres en cause.
Cass. Civ., 2 mars 2017, 15-27831 ; A.Pélissier : "Domaine respectif des règles proportionnelles de prime ou de capitaux"; RGDA 2017, 244, note A.Pélissier ; M.Asselain : "Faut-il appliquer l'article L 113-9 du code des assurances à la lettre ?", RDGA 2017, 251.
De fausses déclarations faites par un assuré en réponse aux questions précises posées par l'assureur ayant été intentionnelles et de nature à diminuer l'opinion du risque pour ce dernier, sont de nature à entraîner la nullité du contrat d'assurance.
Il en est ainsi lorsque l'assuré répond de manière négative aux questions suivantes : « Etes-vous ou avez-vous été atteint au cours des dix dernières années :... d'une maladie cardiaque ou vasculaire, d'hypertension artérielle, d'excès de cholestérol, d'hyperuricémie » et « Suivez-vous un traitement médical régulier, recevez-vous des soins médicaux », et a déclaré sur l'honneur : « 1- Ne pas être actuellement ou avoir été atteint au cours des 10 dernières années : d'une maladie cardiaque ou vasculaire, d'hypertension artérielle, de diabète, 4- Ne pas être actuellement suivi médicalement-avec ou sans traitement-ne pas recevoir de soins médicaux. Ne pas avoir été traité ou soigné médicalement pendant une durée d'au moins 30 jours au cours des 5 dernières années », alors qu'il suivait de façon permanente un traitement pour réguler sa tension artérielle ainsi que son taux de cholestérol trop élevé et qu'il ne pouvait donc déclarer, de bonne foi, ne pas suivre un traitement médical régulier ni des soins médicaux.
Une fausse déclaration d'un assuré soigné par des médicaments contre l'hypertension artérielle et l'excès de cholestérol, témoignant de facteurs de risques particulièrement sérieux, a nécessairement modifié l'appréciation du risque par l'assureur.
Cass. Civ. II, 2 février 2017, 16-14815 - Cass. Civ. II, 3 mars 2016, n° 15-13500 , RGDA 2016, p. 165, note A. Pélissier - Cass. Civ. II, 14 avril. 2016, n° 15-16808 - M.-O. Barbaud : "La preuve de la fausse déclaration d’assurance", RC et Ass 2016, Etude 9 - Cass. Civ. II, 11 Juin 2015, 14-17971, 14-18013 - Cass. Civ. II, 3 Juillet 2014, 13-18760 - Cass. Civ. II, 12 Juin 2014, 13-18936 - Arrêt de principe : Cass. ch. mixte, 7 févr. 2014, n° 12-85107 , LEDA mars 2014, p. 1, note S. Abravanel-Jolly.
La négligence inacceptable d'une agence immobilière qui s'était abstenue d'exercer son devoir de conseil à l'égard d'acheteurs, avec la simple conscience qu'elle faisait courir un risque à ces derniers, exclut le caractère intentionnel ou dolosif du manquement de nature à faire échec à la garantie responsabilité civile de l'agence assurée.
Cass. Civ. II, 12 janvier 2017, 16-10.042
La connaissance et l'acceptation des conditions générales et particulières conditionnent leur opposabilité à l'assuré et non la formation du contrat,
Cass. Civ. III, 20 Avril 2017, 16-10696
La saisine préalable, par les maîtres de l'ouvrage, du conseil de l'ordre des architectes prévue dans un contrat les liant à l'architecte n'est pas une condition de recevabilité de l'action directe engagée par eux contre l'assureur de celui-ci.
Cass. Civ. III, 10 Novembre 2016, 15-24449 ; RCA 2017, Com. 58.![]()
Rappelons que la recevabilité de l’action du tiers subrogé dans les droits de la victime contre l’assureur du responsable n’est pas subordonnée à l’appel en cause de l’assuré.
Cass. Civ. II, 27 avril 2017, 16-15525
La clause d'exclusion excluant de la garantie les dommages résultant d'une inobservation volontaire ou inexcusable des règles de l'art, imputable à l'assuré, ainsi que les obligations de parachèvement incombant aux entrepreneurs dont l'assuré n'aurait pas imposé ni surveillé la réalisation lorsque cette mission lui incombe et les conséquences en résultant, ne permet pas à l'assuré de déterminer avec précision l'étendue de l'exclusion, en l'absence de définition contractuelle du caractère volontaire ou inexcusable de l'inobservation des règles de l'art.
Une telle clause d'exclusion, imprécise, n'est ni formelle, ni limitée, et est nulle par application de l'article L. 113-1 du code des assurances.
Cass Civ. III, 24 Novembre 2016, 15-25415 ; RCA 2017, Com. 62, note H.Groutel![]()
L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance dispose contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur, non seulement de la subrogation légale de l'article L. 121-12 du code des assurances, mais aussi du droit d'invoquer la subrogation conventionnelle dans les droits de son assuré, prévue par l'article 1250 du code civil, résultant de la volonté expresse de ce dernier, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement reçu de l'assureur, sans avoir à établir que ce règlement a été fait en exécution de son obligation contractuelle de garantie ;
Cass. civ. II, 17 novembre 2016, 15-25409 ; RC et Ass. 2017, Com.61, note HG.
La condition de redevabilité de la subrogation "de plein droit" de l'assureur de l'actuel article 1246 du Code Civil, dans sa rédaction issue du Décret du 10 février 2016, est désormais "un intérêt légitime", et non plus d'être tenu "avec d'autres ou pour d'autres" (Art. 1251, 3e ancien) au paiement de la dette. En revanche, la règle de la subrogation "légale", d'ordre public, accordée à l'assureur par l'article L 121-12 du Code des Assurances nécessite que le règlement de l'indemnité résulte d'une obligation de garantie régulièrement souscrite en vertu du contrat d'assurance. Le problème est désormais posé de savoir si un assureur qui a un "intérêt légitime" à "racheter un risque" en faisant un geste commercial à l'égard de son assuré, sans être dûment tenu par sa Police, peut invoquer le nouvel article 1246, sans être obligé de se fonder sur la subrogation conventionnelle de l'actuel 1346-1 du Code Civil pour exercer un recours. Par ailleurs, l'assureur peut avoir intérêt à invoquer le nouvel article 1346 pour invoquer une subrogation dans les droits de la victime, et non de l'assuré, même en l'absence de subrogation conventionnelle de la part de cette dernière. En effet, le véritable auteur du dommage peut bénéficier d'une clause de renonciation à recours de la part de l'assuré et de son assureur. De plus, seule une victime peut agir par voie d'action directe contre l'assureur de responsabilité civile du véritable auteur de son dommage...![]()
PROCEDURE |
Selon les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile, l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif.
Ass. Plén., 13 mars 2009, n° 08-16033 - Les motifs décisifs qui n’y figurent pas n’ont pas autorité de la chose jugée (Cass. 2e civ., 12 mars 1981, n° 79-13161).
Selon l'article 1351 du code civil et la règle de l'autorité absolue de la chose jugée au pénal, ensemble l'article 1384, alinéa 1er, du même code, l'autorité de la chose jugée au pénal s'étend aux motifs qui sont le soutien nécessaire du chef de dispositif prononçant la relaxe.
Cass. 2e civ., 5 juin 2008, n° 07-13256
l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s'attache à ce qui a été définitivement, nécessairement et certainement décidé par le juge pénal sur l'existence du fait qui forme la base commune de l'action civile et de l'action pénale, sur sa qualification ainsi que sur la culpabilité de celui à qui le fait est imputé.
Cass. Civ. I, 24 octobre 2012, 11-20442
Selon l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée au pénal s'étend aux motifs qui sont le soutien nécessaire du chef de dispositif prononçant la décision.
Cass. Civ. II, 30 juin 2016, 14-25070
L'Article 4 du Code de Procédure Civile dispose que :
L'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction prévue par l'article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l'action publique.
Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement.
Suite à la loi du 5 mars 2007 : "La mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil".
Mais rappelons que selon l'article 4-1 du Code de Procédure Pénale :"L'absence de faute pénale non intentionnelle au sens de l'article 121-3 du code pénal ne fait pas obstacle à l'exercice d'une action devant les juridictions civiles afin d'obtenir la réparation d'un dommage sur le fondement de l'article 1241 du code civil si l'existence de la faute civile prévue par cet article est établie ou en application de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale si l'existence de la faute inexcusable prévue par cet article est établie".
Cass. Civ. I, 31 oct. 2012, 11-26476
Selon l'article 706-3 du code de procédure pénale, toute personne de nationalité française peut obtenir réparation par le FGTI par un fait présentant le caractère matériel d'une infraction, même à l'étranger.
La perte de contrôle d'un véhicule ne constitue pas en lui-même, et en l'absence d'autres éléments de preuve, un fait présentant le caractère matériel d'une infraction, notamment lorsque ce véhicule, ayant perdu sa roue arrière droite, avait dérapé, heurté une souche d'arbre et s'était renversé.
Cass. Civ. II, 17 novembre 2016, 15-23.999 ; RC et Ass. 2017, Com.17, note H.Groutel.
LEGISLATION |
- Décret 2017-810 du 5 mai 2017 relatif à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes du valproate de sodium et ses dérivés (Dépakine - Micropakine), pris pour l’application de l’article 50 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 et qui entrera en vigueur le 1er juin 2017.
Il prévoit la création d’un collège d’experts et d’un comité d’indemnisation ayant pour mission d’étudier les demandes d’indemnisation des victimes de l’exposition in utero de ce produit utilisé comme antiépileptique depuis 1967, lequel est associé à un risque de malformation fœtale majeure ainsi que de graves troubles du développement. Il prévoit une procédure d’indemnisation non contentieuse confiée à l'ONIAM, créée par l’article 150 de la loi de finances pour 2017 (CSP art. L. 1142-24-9 à L. 1142-24-18).
Alors que pour le benfluorex, la procédure d’indemnisation ne prévoit qu’un collège d’experts, dans le dispositif d’indemnisation des victimes du valproate de sodium, le dispositif s’appuie sur deux entités, un collège d’experts et un comité d’indemnisation.
L’article L. 1142-24-10 du CSP précise les conditions de saisine de l’ONIAM par les victimes : La personne doit s’estimer "victime d’un préjudice à raison d’une ou plusieurs malformations ou de troubles du développement imputables à la prescription avant le 31 décembre 2015 de valproate de sodium ou de l’un de ses dérivés pendant une grossesse".
Les personnes ayant déjà intenté une action en justice, à la date d’entrée en vigueur du dispositif d’indemnisation, peuvent saisir l’ONIAM afin de bénéficier de la nouvelle procédure.
La procédure d’indemnisation est détaillée aux articles articles R. 1142-63-18 et suivants du Code de la santé publique.
A quand la création d'un fonds d'indemnisation pour les victimes de la pollution de l'air ?
- Dernier état du projet de réforme de la Responsabilité Civile : Mars 2017
- L'article 4 de la loi 2016-1087 du 8 Août 2016 pour la reconquête de la biodiversité de la nautre et des paysages a consacré le principe de la réparation du préjudice écologique dans les nouveaux articles 1246 à 1252 du Code Civil :
Article 1246 : Toute personne responsable d'un préjudice écologique est tenue de le réparer.
Article 1247 : Est réparable, dans les conditions prévues au présent titre, le préjudice écologique consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l'homme de l'environnement.
Article 1248 : L'action en réparation du préjudice écologique est ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir, telle que l'Etat, l'Agence française pour la biodiversité, les collectivités territoriales et leurs groupements dont le territoire est concerné, ainsi que les établissements publics et les associations agréées ou créées depuis au moins cinq ans à la date d'introduction de l'instance qui ont pour objet la protection de la nature et la défense de l'environnement.
Article 1249 : La réparation du préjudice écologique s'effectue par priorité en nature. En cas d'impossibilité de droit ou de fait ou d'insuffisance des mesures de réparation, le juge condamne le responsable à verser des dommages et intérêts, affectés à la réparation de l'environnement, au demandeur ou, si celui-ci ne peut prendre les mesures utiles à cette fin, à l'Etat. L'évaluation du préjudice tient compte, le cas échéant, des mesures de réparation déjà intervenues, en particulier dans le cadre de la mise en œuvre du titre VI du livre Ier du code de l'environnement.
Article 1250 : En cas d'astreinte, celle-ci est liquidée par le juge au profit du demandeur, qui l'affecte à la réparation de l'environnement ou, si le demandeur ne peut prendre les mesures utiles à cette fin, au profit de l'Etat, qui l'affecte à cette même fin. Le juge se réserve le pouvoir de la liquider.
Article 1251 : Les dépenses exposées pour prévenir la réalisation imminente d'un dommage, pour éviter son aggravation ou pour en réduire les conséquences constituent un préjudice réparable.
Article 1252 : Indépendamment de la réparation du préjudice écologique, le juge, saisi d'une demande en ce sens par une personne mentionnée à l'article 1248, peut prescrire les mesures raisonnables propres à prévenir ou faire cesser le dommage.
Article 2226-1 CC : L'action en responsabilité tendant à la réparation du préjudice écologique réparable en application du chapitre III du sous-titre II du titre III du présent livre se prescrit par dix ans à compter du jour où le titulaire de l'action a connu ou aurait dû connaître la manifestation du préjudice écologique. - Idem : L 152-1 du Code de l'Environnement.
Voir : Code de l'Environnement : Titre VI : Prévention et réparation de certains dommages causés à l'environnement.
- Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations à effet du 1er Octobre 2016.
Commentaire J.Bigot, JCP 2016, G, 833 - A.Bénabent : "La "digestion" de la réforme (entrée en vigueur", Revue des contrats, 2016, p.608 - Dossier spécial : "Le nouveau discours contractuel », Revue des contrats 2016.
DOCTRINE |
- F.Ancel : "Quel Juge pour le contrat au XXIe siècle", D.2017, 721
- B.Fauvarque-Cosson : "Première influence de la réforme du droit des contrats - A propos de la nullité relative ou absolue du mandat de l'agent immobilier" : Dalloz 2017, Note 793, sous Ch. Mixte, 24 février 2017, 15-20411, Publié au Bulletin :
L'évolution du droit des obligations, résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, conduit à apprécier différemment l'objectif poursuivi par les dispositions relatives aux prescriptions formelles que doit respecter le mandat, lesquelles visent la seule protection du mandant dans ses rapports avec le mandataire ;
Que l'existence de dispositions protectrices du locataire, qui assurent un juste équilibre entre les intérêts de ce dernier et ceux du bailleur, et la finalité de protection du seul propriétaire des règles fixées par les articles 7, alinéa 1er, de la loi du 2 janvier 1970 et 72, alinéa 5, du décret du 20 juillet 1972 conduisent à modifier la jurisprudence et à décider que la méconnaissance des règles précitées doit être sanctionnée par une nullité relative ;
P. Baillot : "La médiation de l'assurance", Gazette du Palais du 9 Mai 2017.
L.Neyret : "La consécration du préjudice écologique dans le code civil" ; Dalloz 2017, Etude 924.
Sur le site du Village de la Justice : N.Crozier, "Le préjudice écologique : de la jurisprudence au Code civil. Commentaire de l’arrêt de Cour de cassation du 22 mars 2016" M.Hautereau-Boutonnet et E.Truilhé-Marengo : "Quel modèle pour le procès environnemental ?" ; Dalloz 2017, Etude 827.
V.Bouquet - E.Fouassier : "Le projet de réforme de la responsabilité civile et les produits de santé" ; Dalloz 2017, Etude 834
J.-S. Borghetti : "Vue d'ensemble de l'avant-projet de réforme de la responsabilité civile", Dalloz 2016, 1386
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